Lu dans Localtis
François Lamy démine son projet de loi avec les maires juste avant d’affronter les sénateurs.
Mardi 14 janvier au matin, François Lamy se rendait au siège de l’Association des maires de France pour signer une convention d’engagements. C’est donc avec ce précieux texte sous le bras qu’il est allé au palais du Luxembourg, quelques heures plus tard, présenter son projet de loi aux sénateurs. Sénateurs que l’on sait chatouilleux dès qu’il s’agit de renforcer le rôle des intercommunalités.
Quelques heures avant que ne débute, dans l’hémicycle du Sénat et pour deux jours, la discussion de son projet de loi, François Lamy signait, ce mardi 14 janvier, la convention cadre « pour la mise en œuvre de la nouvelle étape de la politique de la ville » avec l’Association des maires de France représentée par Annie Guillemot, maire de Bron et présidente d’Epareca, Valérie Létard sénatrice, présidente de Valenciennes Métropole, Gilles Leproust, maire d’Allonnes et François Pupponi, député-maire de Sarcelles.
On cherchera en vain toute remise en cause du rôle stratégique du président d’intercommunalité dans les futurs contrats de ville. Comme l’avait promis François Lamy dans son discours de Roubaix en octobre 2012, alors qu’il lançait la concertation sur la réforme de la politique de la ville, « le trinôme de la politique de la ville doit rester le maire, le président de l’EPCI et le préfet » (voir notre article ci-contre du 12 octobre 2012).
« La commune est forte dans une intercommunalité de projet »
Aujourd’hui, il est écrit dans la convention avec l’Association des maires de France que ce « trinôme est le garant de la construction de ce projet de territoire solidaire, au bénéfice des habitants des quartiers défavorisés » et que « l’exigence de proximité est assurée par le couple EPCI/commune ». Il est également écrit noir sur blanc que « d’un point de vue stratégique, les contrats de ville doivent être adossés à un projet de territoire développé à l’échelle intercommunale » et que « c’est la condition d’une cohérence d’ensemble de différents sites communaux concernés par la politique de la ville et d’une articulation optimale des différents acteurs impliqués et de leurs interventions ». Ensuite, « d’un point de vue opérationnel, le contrat de ville coordonne les interventions des acteurs selon le principe de subsidiarité ». Dans cet esprit, le contrat de ville devra également préciser « le chef de file de chacune des actions engagées », est-il écrit dans la convention.
Bref, « la politique de la ville ne peut être renforcée que dans la complémentarité de la commune et de l’intercommunalité, qu’elles constituent deux échelles d’intervention d’une même réalité territoriale, et que la commune est forte dans une intercommunalité de projet ».
Tout parallèle avec le PLUI serait infondé…
De quoi rassurer les sénateurs que l’on sait méfiants sur la question de l’intercommunalité, comme on peut encore le voir dans les débats sur le PLUI dans le cadre du projet de loi Alur également en discussion au Parlement… François Lamy le croit. Tout parallèle lui semble d’ailleurs infondé dans la mesure où chaque maire concerné par un quartier prioritaire sera signataire du contrat de ville.
« Sur le rôle du maire, je crois que les débats tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat ont permis de le placer au cœur de la mise en œuvre des politiques de cohésion sociale sur le territoire », a-t-il bien insisté au Sénat, ce mardi après-midi, dans son discours de présentation du projet de loi de programmation pour la Ville et la Cohésion urbaine. Cela étant dit, « ce n’est qu’à l’échelle intercommunale que peuvent s’élaborer des diagnostics cohérents, des politiques de peuplement, de désenclavement ou de développement économique », a complété le ministre.
A cette occasion, il a annoncé qu’il se rangerait à l’amendement de la commission sénatoriale supprimant la sanction aux EPCI qui ne signeraient pas le contrat de ville (mécanisme introduit par les députés en première lecture). « Votre commission a considéré que ce mécanisme était contre-productif et préféré faire le pari de la confiance ; j’entends respecter son choix et ne déposerai donc pas d’amendement du gouvernement sur cette question », a-t-il promis. Il a également trouvé que la « convention intercommunale » introduite en commission sénatoriale était une bonne idée.
Les sénateurs exigeront-ils la liste des quartiers prioritaires ?
Concernant les futurs quartiers prioritaires, le Sénat en exigera-t-il la liste en séance, comme l’avaient fait les députés ? Là encore, le ministre a tenté de déminer.
« La méthode déployée au niveau national est gage de transparence et d’impartialité », a reconnu l’AMF en signant la convention d’engagement (sans attendre le projet de loi qui actera de ladite « méthode »). L’Association des maires a préféré insisté sur le coup d’après : « le périmètre exact du quartier doit être réalisé au plus près du terrain, avec les élus locaux ». Et d’insister : « il importe qu’un aller-retour avec les maires et présidents d’EPCI soit organisé via les préfets avant toute publication définitive de liste des quartiers prioritaires par décret ».
Quant aux territoires sortants de la politique de la ville, l’AMF accepte l’idée qu’ils soient placés en « veille active » et puissent dans ce cadre faire l’objet de contrats de ville levant des financements de droit commun. La convention reprécise également que, dans ces territoires, seront maintenus « jusqu’à leur terme » les contrats des adultes-relais, ainsi que les programmes relevant de la politique de réussite éducative.
Un schéma local de service aux publics dans chaque contrat de ville ?
L’éducation est d’ailleurs, dixit la convention, « le premier » des services publics à « constituer ou à reconstituer » dans les quartiers. Suivent, dans l’ordre d’apparition, la santé, l’emploi, la sécurité, le logement (en tant que « service de première nécessité ») et enfin le transport. Pour les signataires de la convention, « cet enjeu des services aux publics pour les habitants des quartiers prioritaires est primordial tant il est constitutif de la fonction sociale de ces quartiers ».
Au-delà de la déclaration, ils se sont conjointement engagés à ce que « le cadre des contrats de ville 2014-2020 devra permettre à la fois de cartographier les besoins des habitants des quartiers en matière de services aux publics et la réalité de l’offre, et de poser les enjeux auxquels les acteurs locaux s’engageront à répondre d’ici la fin du contrat ». Et cela, évidemment au-delà du « trinôme », en y associant les CAF, les CPAM, les points de contact postaux, les réseaux bancaires, les opérateurs et fournisseurs d’accès de télécommunications… Il est également précisé que « la question du maintien et du développement de l’offre commerciale de proximité fera l’objet d’une attention particulière ».
La septième convention avec des associations d’élus
La convention avec l’AMF intervient après celles signées avec l’ARF (le 13 février 2013), l’ADCF (le 27 mai), Ville et Banlieue (le 19 septembre), la FVM (le 25 septembre), l’ADF (le 11 octobre), et enfin l’AMGVF et l’Acuf (le 29 octobre). « Ces conventions sont un signal fort de l’engagement des élus dans cette nouvelle étape de la politique de la ville », veut y voir François Lamy. « Cela témoigne aussi de l’impatience suscitée par cette réforme », a-t-il ajouté mardi après-midi avant d’inviter le Sénat à « donner corps, par son soutien, (aux) nouvelles dispositions législatives. »