Lu sur MEDIAPART: Les élus de la République ont-ils peur d’entendre les quartiers populaires ?

Les élus de la République ont-ils peur d’entendre les quartiers populaires ?

Marie-Hélène Bacqué, professeure à Nanterre, et Mohamed Mechmache, président d’AC le Feu, ont remis au ministre de la ville des propositions pour une réforme radicale de la politique de la ville, soulignant l’urgence d’entendre les citoyens des quartiers populaires et de les laisser participer. Ils estiment que la nouvelle loi qui vient d’être votée comporte des avancées mais interpellent les élus pour leur demander d’aller plus loin.
Tribune:

« Le 8 juillet 2013, nous avons rendu au ministre de la ville, François Lamy, un rapport intitulé  Cela ne se fera plus sans nous. Pour une réforme radicale de la politique de la ville. Citoyenneté et pouvoir d’agir dans les quartiers populaires. Les propositions de ce rapport avaient été au préalable discutées par une conférence de citoyens dont l’avis est inclus dans le rapport. Rares sont encore en France les moments où l’élaboration des politiques publiques est ainsi mise en débat. En nous confiant cette mission et en nous donnant les moyens d’organiser une conférence de citoyens, François Lamy a pris un pari courageux.

Si la question de la participation n’est pas spécifique aux quartiers populaires, elle s’y pose de façon plus forte. Les taux de participation électorale y sont plus faibles qu’ailleurs ; la crise économique y fait des ravages ; le sentiment de trahison est prégnant vis-à-vis d’un gouvernement de gauche qui n’a tenu ni la promesse du droit de vote aux étrangers, ni celle de mesures contre le contrôle au facies ; la déception est forte vis-à-vis d’élus qui n’ont pas su ou pas voulu prendre à bras le corps la lutte contre les inégalités sociales, raciales et spatiales. Tout cela contribue à nourrir colère, repli sur soi et tensions sociales. Il est de notre responsabilité d’alerter sur la gravité de cette situation, de l’urgence à entendre les citoyens et à agir.

Notre rapport avance une condition préalable et trente propositions pour inverser la démarche de la politique de la ville et passer d’une logique administrative et politique impulsée « du haut » vers une dynamique partant des habitants des quartiers populaires et de leur pouvoir d’agir. La conférence de citoyens a en effet placé comme préalable le droit de vote des étrangers non communautaires aux élections locales. Comment en effet demander à des citoyens qui paient des impôts et participent à la vie sociale de s’impliquer encore davantage sans avoir les moyens de peser sur la représentation et donc sur la décision politique du droit de vote des étrangers ?

Alors que la loi sur la ville et la cohésion urbaine vient d’être votée en procédure d’urgence à l’Assemblée nationale, que reste-t-il de ces propositions ? Quels résultats pouvons-nous restituer aux 120 responsables associatifs réunis à Saint-Ouen en juin dernier et aux plus de 300 personnes auditionnées ?Il faut le dire, le débat de l’Assemblée nationale s’est avéré décevant dans sa dynamique comme dans ses résultats, surtout quand on le met en regard avec la compétence et l’imagination procédurale des participants à la conférence de citoyens.

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